Chers enfants, chers amis(es) ...
Il était une fois des milliers de petits garçons et filles vivant en Algérie, dans les milliers de villes et villages répartis sur tout le territoire qui allaient à l'école, grandissaient, jouaient, ne se doutant pas un seul instant de la catastrophe qui les attendaient, car, il faut bien parler de catastrophe humaine, provoquée par l'exil et les dommages collatéraux qui ont suivis. Mais le peuple pied-noir a hérité de ses ancêtres toutes leurs qualités, celles des pionniers. En venant en France, ou ailleurs sur la planète, il ne s'agissait plus de défricher des terres incultes, d'assécher des marais, de lutter contre le climat et les maladies, de bâtir un pays, il s'agissait de construire sa vie, sa famille, de faire sa place.
Tous l'ont fait, dans l'honneur et la droiture, dans l'amour du travail bien fait, dans le respect de la parole donnée. Maintenant, que tous ces petits garçons et ces petites filles sont devenus vieux, ils témoignent, les sites qu'ils ont créés sont nombreux, émouvants, tous recréent cette vie d'avant, cette vie où ils étaient jeunes, insouciants et installés dans leur terre natale pour mille ans ...
Nous sommes des « Muhadjirouns » des exilés, des vrais sans espoirs de retour, sans espoirs tout court seuls restent nos souvenirs amplifiés par la nostalgie, que nous partageons à longueur de page sur le web ou dans des milliers de livres édités souvent à compte d'auteur, nos publications deviennent nos racines, elles veulent remplacer celles qui furent coupées brutalement une année maudite de 1962.
Qui peut nous comprendre? rares sont les hommes et les femmes de bonne volonté qui puissent accéder à comprendre cette souffrance. Mais malgré tout cela, le peuple pied-noir qui va disparaître, comme toute chose vivante d'ailleurs, ne perd pas son caractère cette joie de vivre, cette bonne humeur et ce bruit qui le caractérise, ce bruit de la parole et du geste dont on lui fait reproche encore aujourd'hui, ce bruit qui cache ses pudeurs, ses tristesses et sa peine immense de l'Algérie perdue, ce bruit qui est notre marque de fabrique.
Ces milliers de petits garçons et de petites filles se retrouvent maintenant autour de la toile, partageant leurs textes d'avant, recroquevillées ensemble comme pour se tenir chaud dans leurs derniers moments leurs histoires, nos histoires seront les monuments de notre patrimoine national, on les visitera comme on visite un château perdu leurs enfants, leurs amis, les anonymes profiteront de ce jour annuel du patrimoine pour leur rendre l'hommage qui convient.
Notre histoire est grandiose, nous étions des petites gens, nous sommes devenus grands. Malgré toute la rancoeur que nous pouvons nourrir contre les politiques d'antan, la France nous a permis de vivre de manière économique sociale et culturelle en échange nous lui avons donné nos grands pères, nos pères nos frères pour la défense de sa liberté, dans la France ce grand pays nous avons reconstruit nos familles, nos vies. A l'heure des bilans nous pouvons être fiers de nous. Vive le peuple pied-noir dont je suis ...
Nous avons su nous intégrer, nous ... d'autres ne le veulent toujours pas ... et contrairement à nous, la France les protège !