Document de base sur l'organisation des colonies agricoles de 1848

Chaque colonie agricole sera placée sous la direction d'un officier ou d'un fonctionnaire civil, auquel il sera donné un adjoint chargé particulièrement de la Direction de l'Agriculture.

Installations des Colons

On devra préparer à l'avance pour les éléments qui seront attendus dans les provinces, des installations provisoires en planches ou en torchis. Ces installations devront avoir une contenance suffisante pour recevoir le nombre d'émigrants affectés à chaque colonie selon les projets d'une commission des centres, approuvés par le ministre.

Les directeurs et adjoints des colonies devront être désignés avant l'arrivée des émigrants. Ils iront à l'avance reconnaître l'installation préparée et recevront les colons à leur débarquement.

On constatera immédiatement le nombre des colons, on s'assurera que la liste en a été exactement établie et que personne ne manque. Enfin, on vérifiera s'ils ont le livret énonçant l'état civil, ainsi qu'il est dit par l'article 4 du règlement ministériel.

Au moment de l'arrivée au port de débarquement d'un détachement d'émigrants, des dispositions devront être prises pour que les voitures nécessaires au transport des effets et du mobilier, à celui des femmes et des enfants, lorsqu'il y aura lieu, soient réunies sur le champ.

L'administration militaire devra assurer ce service, soit à l'aide de ses propres voitures, soit en recourant au transport civil. Les voitures accompagneront le détachement jusqu'à destination.

Lorsque l'installation provisoire aura été établie avec des baraques en planches, ces abris devront être simple et conformes autant que possible, au modèle proposé par le commandant supérieur du génie, soit pour les familles, soit pour les célibataires. Les projets de baraques ont été adressés à Messieurs les Directeurs des Fortifications. Les matériaux qui entreront dans les constructions provisoires devront, autant que possible, pouvoir être utilisés pour la construction définitive.

Il serait utile que l'installation provisoire fut préparée à l'avance pour deux villages à la fois. En cas d'insuffisance de moyen de construction pour les baraques, il y sera suppléé à l'aide de tentes qui seront délivrées par l'administration militaire. Les cuisines communes et provisoire seront construites auprès des baraques, elle seront disposées de telle sorte que les célibataires puissent y faite leur ordinaire en commun, tandis que les familles pourront y préparer leurs aliments d'une manière isolée.

On construira promptement des hangars provisoires avec les moyens les plus économiques, en branchage par exemple, et destinés à abriter les bœufs qui seront mis à la disposition des colons pour la mise en valeur des terres.

Chaque Directeur de Colonie devra veiller à ce que les instruments aratoires nécessaires à l'agriculture, les outils indispensables pour la construction des habitations permanentes, puissent être remis à la disposition des colons au moment de leur arrivé. Ce soin est indispensable pour la bonne impulsion qui doit être donnée aux travaux et empêcher que l'oisiveté ne porte l'ennui parmi les nouveaux émigrants.

Lorsque les chefs de famille le demanderont et que les ressources le permettront, pourront établir les femmes et les enfants dans les bâtiments inoccupés du domaine civil ou militaire pendant la durée de l'installation provisoire jusqu'à ce qu'elle soit assez complète pour les recevoir, sauf inconvénients.

Le territoire des centres à occuper devra être préparé de telle sorte qu'à l'arrivé des colons, les lots qui leur sont affectés puissent être désignés général immédiatement. Les études seront faites conformément à la dépêche du Gouvernement Général (Affaires Civiles) relatives à l'alotissement des communes. Des dépôts d'instruments aratoires et outils serons faits dans les chefs-lieux de subdivision autour desquels se formerons les colonies. Les livraisons aurons lieu d'après les demandes des Directeurs des villages et sur ordre des Commandants de provinces.

L'habitation à laquelle chaque colon cultivateur, marié ou célibataire a droit, au terme du décret du 19 septembre, sera construite de la manière la plus simple, ne contiendra que le strict nécessaire et pourvoira seulement à la nécessité de l'abri et aux rigoureuses exigences de l'exploitation agricole. Ces habitation, conforme le plus possible au modèle adopté par le Ministre, devront toujours contenir deux pièces, et n'avoir généralement qu'un rez-de-chaussée.

Les étables seront des gourbis en branchages que les cultivateurs construiront eux-même. On avisera aux moyens le plus économiques de conserver les grains des premières récoltes, soit avec des appentis, soit avec des silos. Ces silos devront être placés autant que possible sous les maisons. C'est ainsi que les Kabyles conservent leur grain. Si des colons demandent à s'associer entre eux pour la mise en valeur de leurs terrains on leur facilitera les moyens.

Il sera utile de construire promptement une maison de secours destinée à recevoir les agriculteurs et ouvriers d'art célibataires, malades ou blessés. On dotera également les villages d'un ou plusieurs Fours banaux, parce qu'il est essentiel que les colons puissent faire leur pain eux-mêmes, le plus vite possible.

On ne négligera pas non plus la construction du lavoir indispensable aux besoins des familles. Sauf les exceptions qui précèdent, il ne sera construit aucun établissement public avant que les maisons ne soient achevées. Jusqu'à ce qu'il ait été possible d'élever des moulins à vent, on mettra des moulins « pantriteurs » à la disposition des colons dans la proportion de 1 pour 3 villages environ.

Pendant la construction des villages, les géomètres devront compléter l'alotissement du territoire, de manière que chaque famille ait un lot variant de 2 à 10 hectares selon la qualité des terres, le nombre des membres de la famille, leur profession. Cette opération très importante devra être poussée avec activité, parce qu'il est essentiel que les cultivateurs reçoivent immédiatement la désignation des lots qui leur sont destinés. Dans certain cas, il pourra être utile de donner à quelques familles plus de 10 hectares, cela se produira surtout dans les communes qui comprendront sur leur territoire beaucoup de broussailles, de palmiers nains, ou du maquis.

Messieurs les Généraux, Commandant les provinces, et les directeurs des Affaires Civiles, selon les territoires, auront alors à faire des propositions spéciales qui seront soumises à l'approbation du Gouverneur Général.

Dans l'alotissement des communes, on devra réserver la part nécessaire aux communaux et d'une manière proportionnelle aux lots concédés à chaque agriculteur marié ou célibataire. Il conviendra quand l'étendue des terrains disponibles le permettra, de réserver des emplacements qui seront destinés à former des grandes concessions. Il en résultera, dans les communes un contact avantageux de la grande avec la petite colonisation. Lorsque cette condition ne pourra être satisfaite sur le territoire même de la commune, on recherchera à proximité des terrains pouvant recevoir deux ou trois grandes fermes isolées.

Les semences, pour les céréales serons fournies par l'Administration Militaire, à laquelle elles seront remboursées sur les fonds affectés à la colonisation, et par virement de chapitre à chapitre. Le Directeur de chaque colonie, après l'avis de l'agriculteur placé auprès de lui, fera à ce sujet les demandes indicatives de ses besoins.

Il sera pourvu au moyen de marchés passés par l'intendant de l'armée à la fourniture des graines potagères. Il est essentiel que chaque colons puissent se procurer le plus tôt possible, les légumes frais, si utiles pour le ménage on ne devra donc pas perdre de temps pour en commencer la culture. Des ordres sont donnés d'ailleurs pour qu'il soit procédé à la reconnaissance des terrains propres au jardinage, en même temps on fera l'alotissement préparatoire de chaque territoire.

Bientôt la suite sur les instruments aratoires et les outils qui serons fourni aux colons ...